Annabelle Glotin est l’une des 16 étudiants de la première promotion du DU “Santé et Jardins, prendre soin par la relation à la nature” de l’Université Jean Monnet de Saint-Etienne. Elle nous présente le contexte et le thème de son mémoire.
Une interview menée par Jérôme Rousselle
Jérôme : pourquoi avoir choisi ce DU ?
Annabelle Glotin : Après 15 ans de pratique d’éducatrice spécialisée à Marseille, j’ai ressenti un essoufflement, lié notamment au contexte urbain, dû à mon origine rurale. J’ai alors réfléchi à un projet de reconversion vers le milieu de l’agriculture urbaine et j’ai suivi des formations à la conduite de projet à la Cité de l’agriculture de Marseille, à l’agriculture agro-écologique, à l’hortithérapie avec Formavert, à l’ethnobotanique. Au cours de cette phase de recentrage d’un an et demi environ, je suis tombée sur le DU Santé et Jardins dont le programme et le format m’ont vraiment intéressée. J’ai envoyé ma candidature et Pôle Emploi m’a même proposé de financer ce projet de formation !
Jérôme : Ton mémoire porte sur « Comment la médiation autour du végétal peut-elle permettre un meilleur accès aux émotions chez la personne plurihandicapée ? » Comment en es-tu venue à ce choix ?
Annabelle : Au moment où j’ai postulé au DU, mes idées n’étaient pas précises. Dans l’intervalle, j’ai été recrutée dans un établissement pour enfants et adolescents polyhandicapés (EEAP). La direction s’est montrée intéressée par mon projet de formation pour étayer leur réflexion autour des ateliers de jardinage déjà mis en place. Très rapidement, est apparue la problématique du lien entre le fait de toucher la terre, tout ce qui est lié à l’activité jardinage et à la sensorialité et ce que cela éveille ou suscite en terme d’émotions. Cette problématique s’est affinée au fil du DU, notamment lors des échanges avec les autres étudiants, les intervenants et surtout avec ma tutrice, Morgane De Biasi, psychiatre formée en zoothérapie et qui s’est montrée particulièrement pédagogue, disponible et très patiente !
Jérôme : Quels ont été tes principaux axes de travail ?
Annabelle : Je passe sur la partie de mon mémoire consacrée aux fondamentaux théoriques. Mon postulat de départ était que si les personnes polyhandicapées sont certes incapacitées dans les champs de l’autonomie, de la perception ou de la communication, elles ressentent néanmoins des émotions comme tout être humain. J’ai donc cherché à questionner trois hypothèses : premièrement, le contact avec le monde végétal est source d’expériences multisensorielles ; ensuite, la connexion au monde végétal favorise le ressenti d’émotions agréables ; enfin, les expériences sensorielles facilitent le développement des compétences émotionnelles. Un 4ème axe est apparu au fil de mes ateliers — et de ma réflexion — : la pratique d’activités liées à la nature a-t-elle des effets bénéfiques sur la capacité des accompagnants à développer un lien éducatif de meilleure qualité ? Pour finir, une piste de travail non pressentie au départ à émergé : le rapport entre des projets liés à la nature et l’amélioration de la dynamique d’équipe (vitalité, communication, imagination…)
Jérôme : Au-delà de ces axes de recherche proprement dits, quels enseignements particuliers en as-tu retiré ?
Annabelle : Oui, un constat m’a frappé : par rapport aux problématiques des bénéficiaires, il m’est apparu que l’écothérapie, l’immersion dans la nature, leur permettait de mieux accéder aux émotions que le côté actif de l’hortithérapie. C’est à la fois ce que mon expérience m’a fait ressentir et un constat clinique observé dans le cadre de mon mémoire. Mais aussi, je pense parce que nous mêmes accompagnatrices, nous étions plus disponibles durant ces promenades, moins « contraintes » par l’action que nous devions mener, plus ouvertes aux circonstances de la spontanéité, de la rencontre avec la nature, finalement, plus naturelles et ludiques. J’en retiens aussi une volonté de continuer à proposer des sorties en lien avec la nature, d’autant plus importantes que nous vivons dans un univers très bétonné.
– – – – –
À propos du DU Santé et Jardin
De janvier à juin 2023 s’est déroulée la formation de la première promotion du DU “Santé et Jardins, prendre soin par la relation à la nature”, proposé par l’université Jean Monnet de Saint-Etienne. Baptisée “Rachel Carson” par l’équipe pédagogique, en hommage à cette pionnière de l’écologie, elle rassemblait 16 étudiants venus de toute la France majoritairement en activité professionnelle en lien avec la santé, l’éducation ou la formation. La formation s’est déroulée en cinq sessions de deux jours, auxquelles s’ajoutaient les deux jours consacrés aux soutenances de mémoires, fin juin. Selon Annabelle Glotin, l’alternance de cours magistraux, de témoignages, de travaux de groupes et d’immersions dans des jardins de soin avec des publics différents ainsi que la variété des contenus, étaient particulièrement instructifs et inspirants. Et les étudiants ont été très bien accueillis et soutenus par l’ensemble du comité pédagogique qui vivait aussi une nouvelle aventure !
Je partage
Bravo Annabelle et cet interview très intéressante, où l’on saisit les différents étapes de construction de votre mémoire. Cela donne envie d’en savoir plus et de se plonger dans votre mémoire qui est sur le site de la FFJNS. J’espère que cette rubrique reviendra avec d’autres interviews d’autres diplômés du DU Santé et Jardins